Le langage courant tend à les confondre, pourtant, il s'agit de deux techniques distinctes.
Les fresques sont des peintures murales, mais toutes les peintures murales ne sont pas des fresques, même si le langage courant tend à les confondre.
Les peintures murales peuvent être réalisées à partir de pigments (minéraux ou organiques), mélangés avec à peu près toutes les substances possibles (c’est le « liant » ou « medium ») pour les agglutiner et les rendre adhérents au mur préparé à cet effet, càd. généralement une couche d’enduit lisse. Selon la nature des liants, on parle de technique à la détrempe, a tempera, à la cire, à l’huile etc.
Première particularité de la fresque est d’être une peinture murale réalisée à partir de pigment minéraux seulement, mélangés à de l’eau de chaux. Ce mélange pigments + eau de chaux doit être posé sur un mur dont la surface a été préalablement enduite d’un ciment assez grossier (arricio) sur lequel va être ajouté une fine couche d’enduit à la chaux (intonaco*) que l’on veille à garder humide – c’est la 2e particularité – d’où le nom de cette peinture « affresco ». Car c’est en séchant que cet enduit à la chaux va s’amalgamer au mélange pigment + eau de chaux, grâce à un processus chimique, créant une mince couche résistante qu’on appelle le calcin, qui rend alors la peinture inaltérable – à moins de conditions atmosphériques qui amènent à une désagrégation du plâtre du mur.
La fresque est utilisée depuis l'Antiquité, mais la technique n'est optimisée qu'au début du XIVe siècle par le peintre florentin Giotto, qui lui donne ses lettres de noblesse
La fresque est utilisée depuis l’Antiquité, mais la technique n’est optimisée qu’au début du XIVe siècle par le peintre florentin Giotto (v. 1266-1337). En effet, jusqu’à lui, le processus chimique garantissant la conservation de la fresque n’était pas parfaitement maîtrisé. Or Giotto impose que tout l’intonaco qui n’a pas été peint à l’issue d’une journée (giornata) de travail du peintre soit abattu, afin que le peintre soit toujours assuré de peindre sur du plâtre frais. Depuis Giotto, chaque projet de fresque est ainsi découpé en giornate, garantissant ainsi l’intégrité de la fresque.
Bien sûr, les implications sont nombreuses. La fresque est ainsi une technique exigeante, impliquant de la part du fresquiste une grande confiance en soi : il doit en effet imaginer les couleurs telles qu’elles apparaîtront une fois sèches. La technique implique en outre que les joints d’une giornata à l’autre soient habilement dissimulés par le motif, afin de les rendre moins visibles au regard.
Mais enfin et surtout, le peintre n’a pas droit à l’erreur : le séchage progressif du support rend presque impossible le repentir. Lorsqu’il est fait, souvent à sec, sa conservation va être plus aléatoire – exemple le plus pittoresque à cet égard est la figuration de la création d’Adam et Ève à la voûte de l’ancienne abbatiale Saint-Savin-sur-Gartempe (v. 1100, Vienne), où le peintre a interverti après coup les figures d’Adam et Ève, mais son repentir a disparu, nous laissant face à deux Adam barbus qui se font face!
C’est donc Giotto qui donne ses lettres de noblesse à la fresque, qui devient alors LA technique picturale par excellence, telle qu’elle sera pratiquée à la Renaissance par Michel-Ange et encore au XVIIIe s. par Tiepolo.
Illustrations : La Déploration du Christ, Giotto, chapelle Scrovegni, Padoue (1303-1306) Dieu présente Ève à Adam - détail, anonyme, ancienne abbatiale St-Savin-sur-Gartempe, Vienne (v. 1100), voûte de la nef Pour en savoir plus sur l’ancienne abbatiale St-Savin s/ Gartempe, classée UNESCO https://inventaire.poitou-charentes.fr/operations/le-patrimoine-roman/64-decouvertes/392-l-eglise-romane-de-saint-savin-une-voute-peinte-exceptionnelle
* Terme couramment traduit par « plâtre » (sulfate de calcium), mais en réalité, l’intonaco est de la chaux (hydroxyde de calcium), plus solide que le plâtre. Je tiens ici à remercier Pascal Lebrun, artiste, qui m’a apporté ces précisions.
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